J'habite sur Terre,
Au rez-de-chaussée,
Entre Paradis et Enfer,
Le loyer n'est pas donné,
Mais j'aime l'atmosphère,
Mes voisins de palier,
Qui sont tous si fiers,
De gravir l'escalier,
J'ai une vue d'enfer,
Sur les cieux, la Société,
Sur les bas-fonds, la Misère,
La surdité de l'Humanité,
Sur les moeurs arbitraires,
L'absurdité de l'Homme,
Sur les religions suicidaires,
Mais il n'y a pas mort d'homme,
Il y a juste un bémol:
Le Voisin du dessus,
Une vraie casserole,
A se faire dessus,
Il fait trois fois plus de bruit,
Que tous les pauvres rats,
Du sombre sous-sol réunis,
Dans cet autre au-delà,
Il braille, crie, récite,
Des commandements,
Acerbes et hypocrites,
Qui crépitent lourdement,
Sur le fin tambour,
De mes pauvres tympans,
Comme un calembour,
Ayant duré trop longtemps,
Alors d'un coup de balai,
A bout de bras et de nerfs,
Tapant sur le plafond étoilé,
De cette autre sphère,
Je fais tomber la crasse aurifère,
De ma poésie salvatrice,
Comme une pluie amère,
De poussière rédemptrice,
Sur le sol de l'âme humaine,
Déjà sali par tant de religion,
De croyances inhumaines,
Qui tournent l'Homme en dérision,
Je frappe, frappe encore!
Toujours plus haut, plus fort!
Quitte à réveiller les morts:
Mes voisins qui dorment encore,
J'agite le balai de ma poésie,
Comme une épée de Raison,
Et l'on peut me taxer d'hérésie,
Je détiens les clés de la Maison,
Je recouvre le sol humain,
Déjà jonché d'acariens,
Ramasse-poussières, vauriens,
De mes poèmes divins,
Le seul souci quand on habite sur Terre,
C'est l'absence de tout propriétaire,
Pour régler les querelles centenaires,
De tout le voisinage: mes frères...
(2010)